samedi 30 mai 2020

L’école

Dès mes trois ans, Mamy m’accompagne à la maternelle pour la première fois. Elle a le cœur serré. Elle attend un dernier petit signe que je lui ferai de la main, avant de disparaître en classe. Je porte une jupette plissée, confectionnée pour l’occasion. Tu vas aller à l’école. Tu verras comme c’est gai !, avait dit Mamy et elle n’avait pas tort.

A l’école maternelle, Sœur Florence incarne la douceur et la patience mêmes. Madame Huguette, l’année suivante, se montre plus sévère mais dynamique. Elle m’appelle son petit poison parce que j’ai la langue bien pendue et que je ne reste jamais en place. Un jour, elle m’a ficelée à la chaise. Peine perdue, je circule encore entre les rangées, la chaise solidement arrimée au corps.

Avant d’évoquer l’école primaire, je dois préciser que j’ai fréquenté trois écoles différentes, à la suite des événements politiques. Tout d’abord, l’Institut Marie-Médiatrice, dirigé par les Sœurs de Marie de Pittem, des Gantoises. La première année est une révélation : j’apprends à lire. À lire ! 

Avant, j’écoutais Mamy. Il fallait attendre le souper, supporter les odeurs du chou rouge, du chou-fleur, du chou vert ou blanc ou, pire encore, des choux de Bruxelles ou de la choucroute. Je devais m’asseoir à table et me forcer. Avaler une bouchée puis une autre. J’attendais mon histoire du soir. J’attendais Mamy. Après venait le coucher. Mon pyjama sentait bon le soleil et le savon OMO. OMO lave toujours plus blanc. Je tendais le livre à Mamy. Elle s’installait au pied du lit et me lisait le conte de Blondine, Bonne Biche et le Beau Minon.

En septembre 1958, je rentre en première année. Madame Nicole nous a donné un devoir. Je préfère les calculs. Mais, je veux lire des histoires. Mamy ne vient plus le soir. Je suis là, assise sur une chaise, à la maison Acacias. Le livre est ouvert sur la table dans la salle à manger. Le chat reluque la page, celle que je dois lire. Pour faire quelque chose, je me mets à le caresser. Il a de la chance, lui. Il ne doit pas lire. Il attend mon histoire. De toute façon, je sais calculer. Alors, on disait que lire, c’est comme un plus un est égal à deux, hein, le chat ! Il faut y aller :

RÉ + MI = RÉMI. Rémi, c’est un garçon.

A = Rémi a.

U + NE = une. Rémi a une.

RA + ME = rame. Rémi a une rame.

Ah, le garçon a ce qu’il faut pour avancer dans une barquette, sur l’eau ! Aller à la pêche, comme moi avec Papy ou mes amis. Un hameçon. Manger du poisson.  Miam, miam, le poisson, hein, le chat !

En septembre 1959, je rentre en deuxième année, chez Madame Mombeek. Je trouve le temps long. Dis, Mamy, ça va durer encore longtemps l’école ? Et le 17 mai 1959, je fais ma première communion.



1 commentaire:

  1. Le temps de l'apprentissage de la lecture, un très bon souvenir pour moi, j'adorais "déchiffrer" les livres (sourire).

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