vendredi 31 juillet 2020

Indépendance cha-cha et Bulaya (suite 2)

La vieillesse me choque. Chez nous, les vieux Congolais regagnent leur village d’origine et les vieux Européens retournent chez eux pour finir leur vie. Pourquoi ne m’a-t-on pas dit que le corps, non seulement peut mourir, mais aussi se transformer jusqu’à la déformation quand on vieillit ? Me cacherait-on encore d’autres vérités ?

 En semaine, Bobonne porte un tablier pour ne pas se salir. Le dimanche, elle s’habille avec soin pour assister à la messe, si l’état de Bon-Papa le lui permet. Parfois, de la famille ou des amis de nos grands-parents viennent passer l’après-midi. Tantôt c’est le frère de Mamy et sa jeune épouse, une Bretonne gaie comme un printemps. Tantôt, c’est la sœur de Bon-Papa qui fait une apparition tonitruante. Elle est poudrée et maquillée comme un apache sur le sentier de la guerre. Elle m’effraie mais me rassure par des friandises.

Souvent, je me sens triste et je m’ennuie. Pourtant, Bobonne et Bon-Papa se montrent chaleureux. Oncles et tantes nous invitent chez eux afin de nous distraire. Ma grande sœur et ses amies s’occupent bien de moi sur le chemin de l’école.

Le lundi soir, je suis prise de peur panique. Je sais qu’il y aura une dictée française et une séance de natation le lendemain. Curieux, moi qui nage comme s’il s’agissait d’une seconde nature. Je déteste la piscine couverte, là où le soleil ne se montre pas. Elle pue. L’air est saturé de chlore et de buée. Je suffoque dans cet enfermement.

 

Il faut toujours se dépêcher pour prendre le bus, se déshabiller, se revêtir à nouveau, se sécher les cheveux, reprendre le bus pour retourner à l’école. Arrivées, nous nous grouillons encore pour terminer à l’heure H le repas de midi au réfectoire.  J’étouffe.  Au secours !

Heureusement, mon amie Viviane et ses parents veillent. Ils nous entourent bien, ma grande sœur et moi. Nous jouons, nous rions, nous nous rendons entre autres au cinéma Winter Palace ainsi qu’à la Maison du Peuple.

 À Zuen, de l’autre côté du canal de Ruisbroeck, une famille de Luxembourgeois nous accueille amicalement. Leur fille est une compagne de classe de ma grande sœur et nous allons ensemble à la foire de Drogenbos, un village voisin.

 Le soir, lorsque je monte me coucher, je trouve la vie difficile. Je ne maîtrise pas encore bien la notion du temps et encore moins celle du rythme des saisons. À quand le retour chez moi, à Kamina ? Je veux mon PAPA !

                                                                                            (Photo Filo Filo)

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