Ce
midi, pas de chance. Encore un plat que
je déteste par-dessus tout : du boudin noir, du choux rouge et des
frites ! Quelle horreur !
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Termine ton assiette.
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…
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Termine ton assiette !
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…
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Termine ton assiette !!! Et si tu ne veux pas, tu iras dans le coin.
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…
Quelques
minutes plus tard, « Bonjour le coin ». Encore une fois. Tout cela pour du boudin. Mais je ne peux tout de même pas TOUT
manger. Je n’aime ni le boudin, qu’il
soit noir ou blanc, ni les choux, peu importe lesquels : les blancs, les
verts, les rouges, les fleurs, les de Bruxelles, et tous les autres que je ne
connais pas et que j’espère ne jamais connaître.
Je
ne suis qu’une petite fille, moi. Enfin,
pas tout à fait. J’ai six ans et j’ai
déjà fait ma première communion !
Et me voilà de nouveau face aux murs.
Le silence ou à peu près. Un mur
me raconte des histoires que je ne connais pas encore.
Les
minutes s’égrènent. Un
petit cancrelat aligne ses six pattes en rythme tout près de moi. Ses longues antennes palpent les murs, le
sol. Il s’arrête un moment, me regarde,
puis reprend son exploration du coin. Sa
maman l’aurait puni, lui aussi ?
Pauvre chéri. Personne
ne vient me chercher. L’heure
sonne. Personne ne vient. Une
mouchette fait son apparition. Elle
s’est posée sur la manche gauche de ma blouse pour achever un brin de
toilette. Elle me scrute parfois de ses
yeux globuleux, si doux, si tendres.
« Allez, courage, je suis avec toi ! ». Je
m’ennuie franchement, maintenant. Le
soleil a disparu. Il fait sombre et les
grillons se préparent à leur chant du soir. C’est inquiétant …
Ouf,
Félix, le cuisinier, vient me délivrer !
Maman m’a oubliée dans le coin.
Encore et encore … Mais, elle
n’en peut rien, Maman. Elle ne le fait
pas exprès. Elle m’oublie, tout
simplement.
Au
fil de mes punitions purgées dans le coin, je me familiarise avec les murs et
leurs hôtes. Les lézards de passage, eux
aussi, m’inventent des distractions amusantes.
Je leur parle tout bas et ils me répondent. Des murs, je connais leurs fissures et leurs
fragilités par cœur. Je reconnais chaque
trace de moustique écrasé. Mes genoux
proches des plinthes fredonnent parfois des complaintes. Ils se protègent de leur mieux, blottis l’un
contre l’autre. Le coin entend tout et
comprend les chagrins. Mais parfois, il
m’émerveille et me rend ma joie. Je ne
sais pas pourquoi.
À
présent, je suis une jeune femme d’une quarantaine d’années. Une amie me confie son parcours sur le chemin
de la méditation. Elle me prête des
bouquins de bouddhisme zen soto. Ils
décrivent ce qu’est la méditation « zazen », pratiquée assise sur un
coussin, jambes croisées, dos droit, yeux mi-clos et regard posé au sol face à
… un mur !
Contrairement
à pas mal d’Occidentaux, je me sens d’emblée très à l’aise dans cette
posture. « Zazen » me convient
parfaitement. C’est curieux tout de
même. Mes compagnons de méditation se
plaignent régulièrement d’inconfort, voire de douleurs cuisantes ressenties par
leur corps. Certains sombrent dans une profonde
somnolence tandis que d’autres s’emmerdent ferme et se demandent ce que diable
ils font là. Moi, je suis comme un
poisson dans l’eau. Je trouve parfois le
temps long mais c’est supportable. D’où
me vient cette faculté ?
Alors
que je l’avais oublié depuis belle lurette, je me souviens de mon cher coin, du
fameux coin de Kamina, le village qui m’a vu grandir au Congo. Une bouffée de tendresse, pleine de gratitude,
s’envole vers Maman. Oh, merci Maman, de
m’avoir rapprochée si près des murs, de m’avoir expédiée si souvent dans le
coin. Grâce à toi, j’ai été mise
« sur la voie » dès mon plus jeune âge, en chemin vers la vie, telle
qu’elle est, si déroutante et si belle !
Me voilà équipée pour embrasser la Vie, sous toutes ses facettes. Quel cadeau merveilleux !
c'est super bien raconté tout ça...bises à toi!
RépondreSupprimerBises à toi aussi et à ce soir pour ton nouveau billet !
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup aimé lire ce récit, Filo Filo.
RépondreSupprimerTu pratiques donc toi aussi la méditation ? :-)
Belle fin de journée.
Oui, depuis 2007 (zazen - bouddhisme zen soto) et depuis 2015, je suis la formation continue de formatrice en pratique de la méditation laïque à l'Ecole occidentale de Méditation (Fabrice Midal - Paris) et je guide la pratique en bébévolat dans une maison de repos. Mais l'activité est suspendue jusqu'à ... ?
RépondreSupprimerEt Toi ? Tu médites aussi alors ?
Belle et douce journée, Chère Françoise !
J'ai beaucoup médité, je médite encore, moins régulièrement. J'ai fait du yoga, du tai chi chuan, je fais du qi gong et j'ai mes degrés reiki. Voilà, tu sauras tout. :-)
SupprimerBel après-midi, Filo Filo.
Ah, beau parcours d'activités, très profond ! Le tai chi chuan est prévu normalement pour septembre, dans le club sportif des seniors du village. Douce soirée, Françoise.
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